Erdogan, le dernier empereur

Débâcle de la livre turque, déficit de la balance des paiements… Le « miracle économique turc » tellement vanté par Erdogan a du plomb dans l’aile. Par Michel Santi, économiste (*). [Lire plus…]

Ndlr : Michel Santi pourrait bien avoir raison. Sputnik, qui est un média russe anti-occidental, ce qui lui apporte toute la crédibilité souhaitée pour une vision de la situation de l’autre camp, traite de l’invitation de la Turquie aux BRICS. La situation est toutefois bien plus compliquée qu’il n’y paraît. S’il n’y avait pas l’OTAN qui fixe un lien entre l’Occident et la Turquie, qui détient la base la plus avancée en Asie, il serait facile d’imaginer que sa place naturelle serait plus favorable avec les BRICS qu’avec les occidentaux. Mais la géopolitique induit une contextuelle qui s’inscrit dans une schématique plus globale et bien plus contraignante que de prime abord.

Erdogan, conscient qu’avec le Bosphore il détient entre ses mains une des clés essentielles de l’ordre mondial, avait bien tenté de rejoindre les BRICS en cherchant à se rapprocher de la Russie. Il avait alors rencontré Vladimir Poutine à cet effet, mais il a essuyé une fin de non-recevoir. C’est que la Turquie mène une politique anti-terroriste, dont Erdogan nous rebâche les oreilles et insiste bien dans l’article ci-dessus, en Syrie et en Iran. Or, malheureusement pour lui, l’un et l’autre sont des alliés indéfectibles de la Russie et ce quel que soit le régime. La Russie ayant d’ailleurs sa seule base militaire en Méditerranée en Syrie, à Tartous. Ce fait compromet son intégration par les BRICS, qui l’espèrent, mais alors il devra non seulement renoncer à l’OTAN, et donc son partenariat avec l’Europe, mais également à sa guerre antiterroriste avec la Syrie et l’Iran avec qui il deviendra un ami de fait.

Tant que ce ne sera pas le cas, la possibilité de se rapprochement avec la Chine promet d’être compliquée, parce qu’il se trouve que outre le fait que la position de l’Iran le place naturellement dans le camp des BRICS, qui incluent eux la Chine, il s’avère être le dernier rempart de l’agression par les américains de cette dernière par l’Himalaya. Pour la Chine, de fricoter avec la Turquie reviendrait de facto à trahir l’ami iranien, ami de la Russie, membre des BRICS et ami de fait de la Chine par la protection qu’il représente pour elle.

Autant dire que si Erdogan compte sur les chinois pour lui racheter son économie en lambeaux, il pourra probablement compter sur leur opportunisme légendaire, ils seraient d’ailleurs fous de refuser, la Turquie étant tout-de-même rien de moins qu’une porte sur la Méditerranée, l’accès à l’Europe, le passage quasi-obligé des russes par l’Hellespont pour rejoindre leur base militaire de Tartous et tout un tas d’autres avantages, dont la puissance industrielle… mais il ne pourra en aucun cas compter sur leur empathie.

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