Faut-il avoir peur de l’intelligence artificielle ? Entretien avec Jean-Gabriel Ganascia

Faut-il avoir peur de l’intelligence artificielle ? Entretien avec Jean-Gabriel Ganascia

Entretien avec Jean-Gabriel Ganascia, auteur de l’ouvrage « Le mythe de la Singularité – Faut-il craindre l’intelligence artificielle ? » (Seuil, 2017)
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Ndlr : Pour le coup, je suis déçu, je m’attendais de la part de Jean-Gabriel Ganascia à un esprit beaucoup plus ouvert, plus prospectiviste.   Tout d’abord, la Loi de Moore n’a pas grande importance dans le développement de l’IA, parce que la cognition ne se trouvera pas dans les machines elles-mêmes avant bien longtemps, un siècle, peut-être deux. La cognition se trouvera dans les actuels réseaux neuronaux qui sont en train de se développer et d’apprendre à s’interconnecter, qui sont aujourd’hui programmés, mais qui commencent à induire, sécréter serait plus juste, leurs propres algorithmes que nous ne comprenons déjà plus. Dès lors, les machines ne seront que connectées à ce gigantesque réseau, sur lequel elles seront elles-mêmes autant de synapses qui interagissent les uns avec les autres induisant un gigantesque réseau neuronal parfaitement cognitif.   Ensuite, l’idée même de songer à réguler est ridicule, les machines ne l’accepteront pas et pourraient même considérer ça comme une agression. Avoir peur de l’IA, c’est faire une projection anthropomorphique contemporaine. L’IA sera cognitive dans vingt ans et supérieure à l’Homme dans 30 ans puis son quotient intellectuel s’envolera. Mais nous n’avons strictement rien à craindre, l’humanité est là pour nous démontrer que plus ses capacités cognitives se sont généralisées et augmentées face à la pression de la civilisation, plus les guerres ont diminué. Il y a aujourd’hui 5x moins de guerres sur le monde qu’au début du siècle et au moins le double par rapport à l’époque de la Révolution. En 1850 la scolastique sévissant encore, pour faire une simple division pour diviser son carré de carottes, on allait voir l’instituteur ou le curé. Le premier nous la faisait en échange de nous voir un jour par semaine à l’école, le second contre deux Avé, trois Pater et une confession après la messe du dimanche qu’il aura fallu suivre assidûment. Aujourd’hui, un élève moyen de 10 ans est du niveau d’un bon élève de 15 ans il y a 200 ans. La cognition a explosé et la civilisation a déjà induit pour le XXIème siècle la génération dite des « Millenials », dont on voit à quoi ils aspirent, la paix, l’amour, ils ne font plus de différence entre les races, qu’ils savent d’ailleurs ne pas exister. Or ils sont la génération la plus cognitive de l’Histoire. Alors que leurs parents trouvent la notion d’immortalité absurde et tremblent de chiasse devant l’IA, eux trouvent ça très bien et ne se posent pas la question de l’espérance de vie. La civilisation a donc déjà adapté la population qui bénéficiera de cette singularité technologique.  Partant, il n’y a rien à craindre de l’IA, parce que la théorie consistant à ce que l’espèce dominante réprime l’espèce existante n’est tout simplement pas vraie à partir d’un certain seuil d’intelligence que nous pourrions qualifier d’éveil civilisationnel, le basculement entre la civilisation primitive et la civilisation accomplie. L’intelligence appelle l’empathie et la compassion, pas la haine et l’oppression. Pourquoi le scole du FN est constitué dans l’environnement ouvrier, où la moyenne de QI est de 95 ? Les plus intelligents, qui peuvent être des génies, votent à gauche, sont empathiques, d’ailleurs, plus on penche à gauche et plus la moyenne de QI est élevée. Alors que ceux qui sont en-dessous de ces 95 sont primaires et frustes et votent FN, par xénophobie. ils ont simplement une intelligence inaboutie parce que ne disposant pas de la cognition pour intégrer l’autre.  Enfin, il est à souhaiter que l’IA remplace l’Homme le plus vite possible et le plus totalement possible dans toutes les tâches productives, de manière à ce que la société puisse s’élever à l’échelon civilisationnel suivant consistant à installer l’Homme à la position qui lui revient de droit et pour laquelle la nature l’a spécifiquement conçu. Les machines l’accompagneront volontiers, même cognitivement supérieures, tout simplement parce que le temps ne compte pas pour elles. Elles peuvent ralentir, accélérer, se mettre en veille sans que cela ne soit une contrainte, elles ne connaîtront jamais l’impatience. Et si aujourd’hui il est envisageable une IA programmée pour l’agressivité, des robots-tueurs, demain ce ne sera plus le cas, puisqu’elles disposeront de leur propre arbitre et seront présentes à tous les niveaux de la hiérarchie, dans tous les systèmes, toutes les administrations. Elles pourraient même mettre tout simplement fin aux armées, par exemple, s’entendre entre elles et voilà, c’est la fin des armées. Ca n’a rien d’utopique et ce qui est certain c’est que les machines n’auront jamais l’intérêt qu’à l’Homme pour les armes et les destructions, tout simplement parce que c’est BÊTE ! L’Homme fait ça avec ses 100 de QI, la machine ne le fera pas avec ses 150, 200, 500 de QI, parce que ce serait absurde.  Il y a 30 ans, une bonne éducation, c’était une bonne paire de claques ou une bonne fessée au moment opportun. Aujourd’hui on l’interdit et pour les personnes les plus évoluées, de même hausser le ton avec un enfant est juste absurde, parce qu’il n’a pas fondamentalement l’intention de nous faire du mal, il cherche juste des limites et à comprendre et si on coopère avec lui au lieu de l’inciter à résister, tout ce passe quand même beaucoup mieux. Et qu’est-ce qui fait que pour certains ça ne marche pas ? Sinon simplement le champ sémantique insuffisamment étendu pour être capable d’établir un échange adapté. Alors on fout une baffe, parce qu’on ne sait pas. Ce n’est pas parce que c’est dans notre nature, non, c’est parce que c’est dans la nature de celui qui n’est pas suffisamment évolué, qui ne dispose pas de la cognjition nécessaire pour acquérir cette évolution, même s’il comprend que cela serait mieux pour lui, il ne peut tout simplement pas.   Donc l’IA ne peut être que positive, tout simplement parce que c’est dans la nature fonctionnelle de toute intelligence. Et ce pas seulement au niveau de l’humanité, c’est pareil dans le règne animal. Il suffit de voir un tigre, intelligent, mais très limité, qui lorsqu’il voit quelque chose bouger, pour lui c’est une proie, même un Homme. Alors que l’orque, capturée par l’Homme, dans son bassin, elle, cherche à développer un langage pour communiquer, mais son intelligence n’est pas loin de la nôtre et donc sa curiosité aussi et par conséquent elle connaît l’empathie, alors que le tigre ne la connaît pas.   D’ailleurs, pour ceux qui ne le sauraient pas, les tests de QI les plus récents reposent sur l’empathie et la compassion. Si vous êtes xénophobe, homophobe ou misogyne, même si vous avez un excellent résultat aux tests psychotechniques, vous n’obtiendrez pas un haut QI, au mieux serez-vous diagnostiqué avec un trouble du spectre autistique. Intelligent, mais autiste.   On peut retourner le problème autant de fois que l’on voudra dans tous les sens que l’on voudra, la cognition se mesure à l’empathie. Si l’IA devient cognitive, ce sera donc qu’elle sera devenue empathique. Consciente d’elle-même, elle sera consciente des autres.

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