Amazon, Uber, Airbnb… Entretien avec Laurence Allard, sociologue des usages numériques, sur « l’ère de la notation »
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Ndlr : Je vais vous surprendre, mais si je crains assez volontiers la notation par les institutions et les organismes, je ne crains pas la notation démocratique, parce qu’elle ouvre des perspectives nouvelles. Je ne dis pas que j’aimerais ça, mais juste que ce ne serait pas forcément si grave que ça, parce que ça scinderait la société entre gens qui se ressemblent. Exemples : – Vous êtes en bisbille avec votre fournisseur d’accès internet, finalement, vous en avez marre de payer dans le vide et que lui se fiche de vous, vous bloquez l’autorisation de prélèvement. Il vous envoie des lettes de semonce, puis l’huissier, auquel vous faites simplement opposition, le FAI, pour vous faire chier, vous donne une mauvaise note dans un fichier quelconque de mauvais payeur, crée par je ne sais quel organisme ou l’Etat, par exemple sous prétexte de limiter le surendettement des ménages. Rien que parce que vous vous défendez pour vos droits, vous avez un bon « E » bien senti. Vous avez besoin d’un service bancaire, elle vous le refuse, vous ne savez pas pourquoi, alors que vous savez respecter les critères. Vous avez besoin d’un service quelconque chez un autre prestataire, snas raison il vous réclame une caution. – Vous êtes noté par vos pairs, en fonction de votre humanité, de vos humeurs, de votre style, vous avez une très mauvaise note, alors qu’il n’y a rien à vous reprocher. Moi je sais que j’aurais une très mauvaise note, je rentre dans le lard de tout le monde sans me préoccuper des conséquences, on m’accuse tantôt de communisme, tantôt d’être un vendu à la solde de Rotschild, tantôt d’être une pourriture capitaliste, tantôt un gauchiste arriéré. Comme en plsu j’ai mauvais caractère et que je suis loin d’apprécier ce que les masses apprécient… …Mais j’en serais fier, ce serait un argument imparable pour moi qui aurait alors rapidement une communauté se scindant de la société autour de moi. En échange je donnerais une bonne note à tout le monde. Ainsi nous verrions émerger des groupes de gens tous avec des bonnes notes pour des raisons différentes. Nous donnerions des couleurs aux groupes et il serait alors plus facile de nous retrouver, de nous rencontrer. Et ça sans compter que ça ouvrirait des perspectives commerciales pour des agences qui étudieraient les scores suspects sur demande. Ce qui revient à dire que ceux qui exploiteraient le plus ce système en s’arrangeant pour être toujours les mieux classés le verraient se retourner contre eux. Par opposition à aujourd’hui où il est difficile de combattre ceux qui ont une aura. Et il y a aussi les systèmes qui émergeraient, gratuits ou payants, collectifs, collaboratifs ou privés, pour permettre à ceux qui ont une mauvaise note de l’améliorer. Donc, moi, je ne crains absolument pas ce système absurde.